“Le temps n’a pas le temps pour le temps”. Cette expression n’est pas de Jean-Claude Vandamme mais de Thierry Henry, le meilleur buteur de tous les temps de l’équipe de France de football. Elle est loin d’être aussi absurde qu’il n’y paraît, et nous enseigne certainement quelque chose.
Dégager du temps, maîtriser le timing, trouver le temps, prendre le temps, gagner du temps, autant d’expressions qui montrent à quel point le temps est un partenaire difficile à dompter.
Le temps est un sujet essentiel pour l’entrepreneur, l’innovateur ou le manager. A la fois contrainte et opportunité, le temps semble toujours manquer. “Ne pas avoir le temps” est le symptôme de choix inadaptés, mais “ne pas avoir le temps” est aussi un signal auquel il faut être attentif pour réussir.
“Je n’ai pas le temps”
L’an dernier, nous avons réalisé une enquête auprès de 300 PME sur les principaux freins à l’innovation: le manque de temps est le deuxième frein le plus cité.
“Je n’ai pas le temps” est une des phrases d’excuses les plus fréquemment utilisées. Elle a l’énorme avantage d’être imparable et d’offrir un bouclier moral puissant.
En disant “je n’ai pas le temps”, nous souhaitons consciemment ou inconsciemment, que l’autre comprenne: “je travaille beaucoup sur des choses très importantes et je n’y suis donc pour rien, si je n’ai pas pu faire ce que tu me demandes”. Et voilà, le tour est joué. En quelques mots, nous avons réussi à nous dédouaner. Mieux, nous avons probablement gagné l’empathie, voire l’aide de notre interlocuteur.
Comme cette technique marche quasiment à tous les coups, nous ne sommes pas incités à l’abandonner. Elle est pourtant extrêmement toxique. En l’utilisant, nous nous mentons à nous-mêmes et nous occultons ainsi les vraies raisons de notre situation, à choisir parmi une longue liste:
nous voulons faire trop de choses
nous ne savons pas faire des choix
nous ne savons pas prioriser
nous ne sommes pas efficaces
nous sommes perfectionnistes
nous ne savons pas déléguer
nous procrastinons
……………………… (rajoutez ici vos raisons)
Le déni de réalité caché derrière l’excuse “je n’ai pas le temps” nous empêche de nous attaquer aux vraies raisons de notre surmenage. Elle nous empêche donc de progresser.
Retrouver sa liberté
Ne jamais avoir le temps est une oppression. Que faire pour retrouver sa liberté ?
Peu après la création de son entreprise, l’entrepreneur encore seul, se retrouve vite avec un emploi du temps surbooké: la production à assurer, les colis à expédier, le site web à mettre à jour, les clients à démarcher, les clients mécontents à rappeler, le business-plan à réactualiser, la comptabilité à faire, ….
L’entrepreneur pense alors que plus tard çà ira mieux. Malheureusement, plus tard, il y a encore les clients dont il faut s’occuper (et en plus, ils sont plus gros et plus nombreux), les salariés à manager, les prêts à négocier, les fournisseurs à rappeler, le conseil d’administration à organiser, le salon à visiter, ….
Ne pas avoir le temps est un mal chronique de l’entrepreneur.
La liberté est l’usage choisi de son temps. Se retrouver en permanence sous la pression du temps est une privation de liberté. L’aveu de manque de temps est avant tout une périphrase pour expliquer qu’on ne fait pas ce qu’on veut, mais ce qu’on peut.
Plus que quiconque, l’entrepreneur doit arrêter de dire “je n’ai pas le temps” pour enfin s’attaquer aux vrais problèmes. Le jour où il décide de ne plus utiliser cette excuse anesthésiante, l’entrepreneur retrouve sa liberté, et sa capacité à progresser et à réaliser de grandes choses.
Cette problématique concerne en fait tout le monde. Je vous propose l’approche suivante pour en sortir:
décider de ne plus dire “je n’ai pas le temps”: en verbalisant cette excuse, vous vous persuadez qu’elle en est une, et que la solution n’est pas entre vos mains.
donner plutôt la vraie raison de votre retard: “j’ai procrastiné sur le rapport”, “je n’ai pas délégué cette tâche”, “je n’ai pas commencé par le plus important”. En verbalisant la vraie raison de votre manque de temps vis-à-vis d’un tiers, vous la rendez réelle, et quelque part vous vous obligez à corriger le tir.
commencer à travailler sur la raison verbalisée: si vous n’avez pas délégué, commencez à imaginer à qui vous pourriez déléguer et mettez le en œuvre dès la prochaine fois. Si vous avez été perfectionniste et avez passé 4 h au lieu de 2 sur votre dernier rapport, décidez de ne vous accorder que 2 h la prochaine fois.
Progressivement, vous allez ainsi mettre en place des solutions qui vous feront “gagner du temps” et peu à peu retrouver votre liberté. Sur certains sujets, vous aurez peut-être besoin d’aide. Il existe de nombreux livres qui donnent des outils pratiques pour être plus efficace. Un coach peut aussi vous aider à mettre en place l’organisation qui vous correspond.
La liberté est essentielle pour exprimer nos talents. Veillons ne pas l’entraver par le manque de temps chronique, conséquence de nos inconséquences.
Conscientiser l’urgence
La crise du Covid-19 nous rappelle qu’en certaines circonstances, il faut agir vite. L’urgence raccourcit le temps. Conscientiser une situation d’urgence permet de comprendre qu’il n’y pas le temps d’attendre, et qu’il faut agir vite. Dans ce cas, “je n’ai pas le temps” n’est plus une excuse, mais un puissant moteur de l’action. “Je n’ai pas le temps” devient “je n’ai plus le temps”.
L’innovation est une de ces situations où agir vite est primordial. Trop souvent, l’entrepreneur qui a une idée innovante, avant les autres, met trop de temps à la concrétiser. Il arrive sur le marché trop tard, alors que des concurrents sont déjà là, où qu’une autre tendance a été lancée.
Je me rends compte en accompagnant des créateurs d’entreprises innovantes, que la conscience de l’urgence est trop souvent absente. Celui qui a une idée innovante pense qu’il est le seul. Il est préoccupé par la crainte de se faire voler son idée. Presque jamais, il a peur que quelqu’un d’autre ait déjà eu cette idée. En 15 ans de métier, je n’ai jamais vu quelqu’un se faire voler son idée. J’ai par contre vu des dizaines de fois, quelqu’un se faire doubler par un autre qui avait eu la même idée !
“Le temps n’a pas le temps pour le temps”. Thierry Henry explique par cette formule que dans certaines situations, on n’a pas le temps de prendre du temps. Même le temps ne se permet pas de flâner et de perdre du temps. Le temps se déroule inlassablement, toujours à la même vitesse.
Quand il lance une startup, l’entrepreneur voudrait peaufiner son produit pour qu’il soit parfait, et il a tendance à prendre son temps. Mais non ! au début d’une startup ou d’un projet d’innovation dans une entreprise, il n’y a pas de temps à perdre. Il faut aller droit au but et délivrer très vite une première version pour tester le marché. Il s’agit alors d’être très efficace, d’avancer sans avoir toutes les réponses, de trouver des raccourcis.
La conscience de l’urgence pousse à agir et à trouver des solutions qui au final font gagner du temps. Paradoxalement être dans l’urgence est une façon d’économiser le temps.
Le temps de l’action
Ne pas avoir le temps parce qu’on est trop occupé, est une mauvaise chose. Le temps est rempli d’actions qui pourraient être déléguées ou réalisées plus efficacement. Il faut alors mettre en place des actions correctives pour libérer du temps et retrouver sa liberté.
Ne pas avoir le temps quand il y a urgence, est une bonne chose. L’urgence conscientisée pousse à l’action efficace, l’essentiel prime sur l’accessoire.
Dans quel temps êtes-vous ? celui du temps qui se dérobe par sa mauvaise utilisation, ou celui de l’urgence qui pousse à l’efficience ? En le conscientisant, vous pourrez trouver des solutions, être efficace et accomplir de grandes choses.
Pour aller plus loin
La semaine de 4 heures, un best-seller de Tim Ferriss
Dans la tête d’un expert en procrastination, Tim Urban
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D’un point de vue aussi bien philosophique que logique « le temps n’a pas le temps pour le temps » est absolument absurde; si il existe bien un concept qui peut avoir le temps d’avoir le temps, c’est bien le temps, du fait que celui-ci est infini.