#25 Un coaching avec Denis Troch
confinement, intuition, préparation mentale, management, bon sens, ...
Nous voilà déjà au 25ème épisode de cette Newsletter. Pour marquer ce passage, j’ai interviewé Denis Troch. Si ce format vous plait, j’inviterai régulièrement des personnes qui apporteront leur éclairage sur les sujets d’Un pas dans l’inconnu. Ce n’est pas un hasard si je commence cette série par Denis. C’est lui qui m’a inspiré et permis de lancer cette Newsletter. Bonne lecture.
CT: Bonjour Denis, je suis heureux de te recevoir aujourd'hui pour cet entretien. Même si tu es bien connu, est-ce que tu peux te présenter ?
DT: Denis Troch, j’ai 60 ans, j'ai trois métiers: j'étais joueur de football professionnel jusqu’à l'âge de 25 ans, de 25 à 48 ans, j'étais entraineur de football professionnel, et depuis l’âge de 48 ans, j’ai un nouveau métier, c'est d'être accompagnant avec des outils liés à la préparation mentale notamment.
Avant la crise, créer des anticorps
CT: Comme chacun de nous, au mois de mars, tu as entendu cette annonce du confinement, et pour un sportif actif, cela n’a pas dû être facile. Comment as-tu vécu ce moment, ce “pas dans l’inconnu”?
DT: Chaque fois qu'il y a quelque chose d'extraordinaire qui nous tombe dessus, les réactions sont toujours les mêmes. Que l'on soit hyperactif comme moi, ou que l’on soit calme et passif, le phénomène est le même. Dans un premier temps, personne n’y croit, et on a envie de se raccrocher à des repères, à des choses simples qui étaient là précédemment. On n'imagine pas que cela puisse, non seulement nous tomber dessus, mais en plus durer dans le temps. C’est toute une période de déni, une étape de ce qu'on appelle la courbe du deuil. On reconnait ensuite la réalité du moment, pour finalement se rendre compte qu’effectivement la situation est complexe, difficile à vivre pour certains et pour d'autres beaucoup moins. Cela change les normes et les habitudes, et toutes les émotions arrivent ensemble, et c'est un peu le « foutoir » dans nos têtes. Il est alors nécessaire de faire du rangement.
CT: Quand tu as entendu l’annonce du président et qu’il restait 3 jours pour se préparer, quelles étaient tes émotions, et comment tu t'es préparé ?
DT : La première des choses, qui peut paraître bizarre, j'avais imaginé depuis bien longtemps déjà, le fait que nous puissions être confinés. Dans ma tête, j'ai pour habitude de voir tout ce qui est impossible, inimaginable, de manière à créer ce que j'appelle des anticorps, et pouvoir ainsi gérer au moins mal les situations complexes. J'ai cette habitude et jusqu'à présent cela m'a toujours réussi.
J'imagine le pire, comme j'imagine le mieux, et en l'occurrence là, j'imaginais qu’il fallait rester confiné. Quand j'ai appris par la bouche du président que nous resterions confinés, cela n'a été qu’une continuité à ma démarche, et j'ai simplement accepté ce qui se passait. Je fais 90000 km en voiture par an, au moins autant en train, et je me déplace dans toute la France, alors vous imaginez un petit peu le changement. Ce ne sont plus des résolutions du nouvel an, où on se dit, j'arrête de fumer, j'arrête de boire, je vais faire du sport, je vais faire une quête sur quelque chose. Ce n'est pas du tout ça, c'est une situation qui nous ramène à l'essentiel. Chacun d'entre nous va changer dans des situations qui vont systématiquement être exacerbées, parce qu'on n’y est pas habitué, et donc on va s'adapter.
C'est peut-être le seul moment où on a compris qu'on avait un mental, et qu'il fallait l'utiliser, pour gérer la frustration, les excès émotionnels, les changements de comportement, la nouvelle façon de travailler, le fait de ne rien faire, le fait d'en faire plus, le fait d'être à proximité des autres, le fait d'être isolé. Toutes ces choses-là nous amènent à travailler, à entraîner notre mental, et donc il y a du bon, même si pour certains c'était pénible.
Pour appréhender quelque chose d’inconnu, je me mets dans une situation de crainte, de peur, de doute, parce que je sais que quand je doute, je crée, je trouve des solutions. Avant une compétition, c'était la même chose, je doutais toujours, mais une fois que la compétition était lancée, je n'avais plus aucun doute, je fonçais vers le résultat final. Là, c'est un peu la même chose. Quand j'ai entendu qu'il y avait des problèmes en Chine, qu’il y avait des gens qui pouvaient être confinés, j’ai amplifié cela puissance 10, et je me suis imaginé cela chez nous. Je ne sais encore comment je vais faire face, et donc ça chemine dans ma tête, et des solutions, des hypothèses, des supputations vont se développer pour faire face à cette situation hors norme.
Pour prendre des décisions, je n'attends pas d'avoir 80 % de positif, je n'attends pas non plus d'avoir 50 % de positif, je vais imaginer des prises de décision impensables, où il n’y a que 0,1 % de faisabilité. Alors quand la faisabilité passe à 1 %, je me dis que c'est exponentiel, et que c'est maintenant qu'il faut que je prenne la décision. Je ne veux pas être court-circuité, je ne veux pas perdre pied, je veux anticiper, et donc je prends des décisions qui me paraissent exponentielles en partant de quelque chose qui est improbable, et qui devient possible. A partir de ce moment-là, je me lance.
CT: C’est un outil ou une méthode de la préparation mentale. Se dire que face à quelque chose de difficile que j'imagine et qui me fait peur, je me prépare en avance pour être ensuite capable de l'affronter quand ça arrive.
DT: Oui, c'est la création d'anticorps pour être autonome face à la difficulté qui nous arrive, et ne pas être dépendant de qui que ce soit ou de quoi que ce soit.
Intention, attention, intégrité, les 3 ingrédients de l’intuition
CT: Comment fait-on pour anticiper à ce point ?
DT : Au plus haut niveau dans le monde du sport, on essaie de ranger tout ce qui est conscient dans l'inconscient et tout ce qui est inconscient de l'amener de façon consciente. On alterne entre conscient et inconscient, de manière à pouvoir agir vite, et anticiper. Au plus haut niveau, si on commence à réfléchir, on perd du temps. Par exemple, un pilote automobile quand il roule à 300 km heure dans une ligne droite, il ne sait pas exactement à quel moment il va appuyer sur la pédale de frein quand le virage arrive. Et pourtant, il freine toujours au bon moment, sans réfléchir. S'il appuie trop tôt sur la pédale de frein, il se fait dépasser par ses concurrents. S'il appuie trop tard en bout de ligne droite, il prend le mur et sa vie est en danger. Il le fait de façon naturelle, intuitive, sans avoir besoin de passer par la case, je réfléchis pour donner une réponse.
Nous allons chercher mécaniquement et machinalement une réponse à une question dès que nous avons rangé dans notre inconscient des choses répétées à l’entrainement. Il faut savoir que nous prenons 35000 décisions par jour, dont 99,7 % sont inconscientes et seulement 0,3 % sont conscientes. En vous levant, vous ne vous posez pas la question de savoir si vous savez marcher, vous ne vous posez pas la question de savoir si vous allez boire du café, du thé ou du chocolat, vous le faites de façon instinctive, intuitive et ça ne prend pas de temps. C'est exactement ce que font les sportifs. Tout ce qu'ils font bien, et qu'ils réussissent parfaitement, ils le rangent dans leur inconscient pour pouvoir s'en servir de façon réflexe. Et bien, on peut aussi faire cela dans la vie de tous les jours.
CT: Est-ce cela qu'on appelle l'intuition ? J’écrivais récemment (Un pas dans l’inconnu #19) qu’en période de crise, on n'a peut-être pas le temps de s'asseoir, de réfléchir, de faire des business plans, qu’il faut agir, et agir c'est souvent le fait de l'intuition. Est-ce que cela ressemble à ce que tu dis ?
DT: Bien entendu. On peut difficilement rationaliser l'intuition. Pourtant, il y a des choses qui peuvent nous rapprocher de cette intuition. Il y a trois paramètres à prendre en considération:
Le premier c'est l'attention : être attentif à tout ce qui se passe autour de nous. Dans des périodes un petit peu compliquées, par exemple sur le Covid, j'étais attentif à ce qui se passait en Chine, à ce qui se passait en Italie.
La deuxième chose, c'est être intègre : est-ce que j'en suis capable, est-ce que j'ai la possibilité de réaliser quelque chose, c'est ce qu'il faut que je me mette dans la tête.
Le troisième paramètre, c'est l'intention: je suis régulièrement dans une intention de faire quelque chose, dans l'intention d'agir, de voir, de répondre.
A partir du moment où vous avez ces trois paramètres, l'intention, l'attention et l'intégrité, vous avez en général plus de possibilités d'être intuitif et d’anticiper sur ce qui peut se passer demain et après-demain.
Tout ce qu'on apprend en temps normal dans les lectures, les informations, les formations, c'est parfait. Pourtant dans des moments complexes et difficiles, on va aller simplement rechercher ce que l'on s'est approprié, et pas ce que l'on a appris. Dans les moments de crise, on ne se rappelle même plus ce qu'est un SWOT, un objectif SMART, ou les 7 S de McKinsey. On ne s'en rappelle même plus, parce que l'essentiel, ce sont les états primaires. Que fait-on dans des situations où notre vie est en danger ? Ce sont des réflexes que l'on va rechercher dans des moments difficiles, et ce sont des réflexes que l'on s'est appropriés, que l'on a rangé dans notre inconscient.
L’entreprise de demain: une agilité organisée autour de missions
CT: Suite à cette crise, est-ce qu'il y a des choses qui auront profondément changées pour toi ?
DT: Pendant ces 2 mois, j'ai écrit. J'ai déjà écrit un bouquin qui vient juste de sortir, «Devenez champions de votre propre monde» et il y en a un deuxième qui va sortir d'ici la fin de l'année. “Manager en danger” ou “manager en crise”, je ne sais pas encore le titre. J'écris sur les différents types de management et aussi sur comment les entreprises vont agir dans les années à venir.
Je me suis rendu compte qu'il y a des choses qui reviennent de façon récurrente. Notamment, il y a une grosse difficulté liée à la lourdeur des entreprises, des charges, de tout ce qui est fixe. Je crois que l'agilité, ce doit être une agilité liée à des missions. Je crois que demain les entreprises pourraient tendre vers quelque chose qui ressemblerait à des situations du genre : s'associer à 3 entreprises pour une durée de 2 mois, pour faire une mission spécifique qui n'existe pas actuellement. Pendant ces 2 mois, les entreprises vont agir puis se séparer pour se mettre avec cinq ou six autres, ou avec une autre, pour une autre mission pour être beaucoup plus créatives. On n'est jamais aussi bon que quand on est trois, quatre, cinq pour réfléchir à des problématiques. Une entreprise pourrait aussi s'associer à d’autres entreprises ayant une spécificité qu’elle n’a pas, pour proposer une nouvelle offre.
Je crois qu'on doit jongler, surfer, bouger de manière à ne pas s'enraciner. Ces missions éphémères entre entreprises seraient des missions dont on n’a même pas l'idée aujourd’hui qu'elles pourraient exister.
CT: Est-ce que tu peux nous donner un exemple ?
DT: Pendant le confinement, un matin à 10h, j’ai décidé de réunir une dizaine de personnalités pour une visioconférence à 15h le même jour. J’ai envoyé un mail à des personnes qui pouvaient les contacter. Trois heures après l'envoi, tout le monde m'avait répondu sauf un qui m'a répondu seulement le lendemain. Il y avait le sélectionneur de l'équipe de France de basket, Vincent Collet, le sélectionneur de l'équipe de France de handball, Guillaume Gilles, Marc Madiot, responsable d’une équipe professionnelle de vélo, Rudy Garcia, entraîneur de football de Lyon, le numéro 2 d’un grand groupe mondial, celui qui prend toutes les grandes décisions. Il y avait aussi le directeur d’un CHU, un psychiatre, un philosophe, un politique numéro 2 de son parti. Toutes ces personnes ont participé à la conf call pendant 2h. J’avais appelé ce moment “les cafés du management éphémère”. A la fin, ils ont voulu se retrouver la semaine suivante. La semaine d'après, je me suis dit, il y en a 3 ou 4 qui ne vont pas venir. Tu parles ! Tous, sans exception étaient présents. Nous avons fait trois conf calls sur des thématiques spécifiques au management. C'est énorme et jamais je n'aurais pensé réunir toutes ces personnes là. Avoir des entreprises ensemble pour des missions éphémères, je me suis dit, il faut que je vois si cela fonctionne. Je me suis associé avec 10 autres personnes pour faire une conf call et cela a marché.
Quelque part, c’était une intuition. C'est aujourd'hui, ce n'est pas hier ni après demain, c'est à un instant T. Comme je disais tout à l'heure, c’est être attentif, être intègre et être dans l'intention de. Tout ce qui est réfléchi ne fonctionne pas forcément. Aujourd'hui je pense qu’on est dans une nouvelle ère, l'ère de la créativité, de l'anticipation, de l'intuition. A un moment donné il faut penser aux choses puis trouver le bon moment pour les mettre en place. L'idée, c'est de trouver des choses qui ne se font pas, des choses nouvelles, et les mettre en application. Dès que tu commences à copier quelque chose ou quelqu'un, tu as déjà un temps de retard.
Beaucoup de personnes essayent de se dire: voilà ce qu’était le monde avant, voilà ce que pourrait être le monde après le Covid. Tout le monde va avoir à peu près les mêmes réponses. J'ai envie de penser qu'il est bon de trouver autre chose, de faire autrement, de manière à pouvoir surprendre, étonner et avoir un temps d'avance dans la mesure du possible. Je pense qu'il faut anticiper, aller de l'avant, créer, innover, se surprendre, s'étonner, être étonnant. Je crains parfois que l'on revienne à des choses qui ont fonctionné avant et qu’on se dise qu’on va les adapter. Peut-être que cela va fonctionner, mais je crois quand même, qu'il y a de nouvelles choses à mettre en place. Il y a de la place pour tout le monde, pour ceux qui sont habiles et qui pensent, pour ceux qui sont habiles et qui mettent en action, pour ceux qui sont habiles et qui vendent. Toujours, il y a toujours la possibilité pour être ouvert.
Apprendre à être managé
CT: Qu’est-ce qui va encore changer dans le management ?
DT: Je me donne encore 3 mois pour bien penser à un système que j'avais déjà commencé à imaginer il y a 8 ans ou 10 ans, sur les nouvelles normes, sur le nouveau type de management, revenir sur le B-A-BA du management et amener des choses nouvelles. Le B-A-BA c'est simple. On est manager de 10 personnes, on doit donner un dixième de notre attention à chacune d’elles. En fin de semaine ou en fin de mois, on peut se rendre compte si on n'a pas été équitable. Je n’ai pas dit qu'il fallait donner un dixième de son temps, j'ai dit un dixième de son attention: pour certains ce sera du temps, pour d'autres ce sera des signes de reconnaissance, pour d'autres ce sera discuter sur des situations techniques ou stratégiques. Tout cela, c'est donner de l'attention, un dixième pour chacune des personnes qui se retrouve autour de nous. C'est important, c'est l'essentiel, c'est l'équité, le respect des gens avec lesquels je travaille.
Je rappelle toujours des choses simples: on nous apprend parfois à manager les autres mais on ne nous apprend jamais à être managés. 100% des gens ont au-dessus d'eux un manager, ou bien des fonds ou bien une organisation et on est toujours dépendant. Être managé par quelque chose ou quelqu'un, on ne nous l'apprend jamais, on ne dit pas comment il faut être managé. Pourtant c'est fondamental pour éviter les crises, les traumatismes, parce que beaucoup ne comprennent pas comment ils sont malmenés en sortant des écoles et quand ils deviennent manager, ils reproduisent les mêmes choses. C'est vraiment le serpent qui se mord la queue.
CT : Tu dis il faut apprendre aux gens à être managé, c'est quoi les leçons principales à apprendre ?
DT : Simplement, leur dire qu'il y a des protections à se mettre, qu’il y a des autorisations à prendre, c'est à dire qu’on peut se permettre de dire les choses quand on est managé, mais aussi on doit se protéger. On ne peut pas prendre les émotions toxiques de la personne qui nous manage. C'est impossible et pourtant on en prend tous les jours, pas que dans le management, même dans la vie. Je prends toujours un exemple : j'ai une de mes filles quand elle était petite, elle avait peur des guêpes parce qu'elle s’était fait piquer par une guêpe à 6 ans. Depuis, elle a peur des insectes volants. Aujourd'hui, elle a des enfants, et une de ses filles a peur des insectes volants.
Qu'est-ce qui s'est passé ? La mère, voyant un insecte se poser à côté de sa fille qui était toute petite, a peur et chasse l'insecte qui allait vers sa fille. Voyant sa mère qui l’aime et la protège avoir ce geste, la petite se dit : la guêpe est un danger. Du coup, la petite s'approprie une peur qui n'est pas la sienne, donc ça veut dire quoi ? La mère, pourtant veut l'aider, elle aime sa fille, elle l'adore, et pourtant elle a transmis une émotion de peur qui n'est pas légitime. La petite aura peur quotidiennement et régulièrement tout au long de sa vie des insectes volants.
Un manager peut très bien aimer ses collaborateurs, et pour autant transmettre des émotions qui peuvent être néfastes pour les collaborateurs. Il ne le fait pourtant pas exprès, il ne se rend pas compte. On ne l'apprend pas et pourtant c'est le B-A-BA. Si on fait prendre conscience à une personne que telle attitude ou tel comportement d’un manager pourrait transmettre des émotions toxiques pour les autres, elle va faire attention.
Développer exponentiellement son potentiel en prenant des risques
CT: Quelle seraient selon toi les qualités que doivent développer les entrepreneurs pour réussir cette transition ? Il y a beaucoup d'entrepreneurs, de managers qui aiment que les choses soient carrées, qu’il y ait des process, des business plans, des prévisions. Mais là cela va changer, qu'est-ce qu'il faut développer comme qualité ?
DT: Il ne faut surtout pas retirer tout ce qui sécurise, ne pas mettre en l'air tout ce qu'on a fait précédemment pour passer à autre chose. On doit garder ce qui est sécurisant, mais on doit se permettre régulièrement de prendre des risques. Dans le monde du sport, c'est ce qui se passe. Si j’ai un potentiel de 100, je vais prendre des risques sur 5% de mon potentiel, je vais dévier, je vais essayer de trouver autre chose, de voir différemment. Si je perds, je perds 5 % mais je garde 95 % de fiabilité. Par contre si je gagne, mon potentiel est de 105%. Là-dessus, je prends à nouveau 5% de risque, ce qui veut dire que c'est exponentiel, et je vais pouvoir grandir grâce à cette prise de risques qu'elle soit réussie ou que j'échoue. Je ne remettrai jamais en question tout ce qui me sécurise, qui me permet d’être fiable et fort, mais dans cette prise de risque, je vais essayer d'alléger régulièrement la lourdeur de l'entreprise.
C'est être agile de pouvoir bosser parfois avec la concurrence, aller rechercher des partenaires qui ont des compétences qui ne sont pas les miennes, éviter de vouloir tout faire. Je parle avec une aisance terrible, mais ce n'est pas simple à mettre en place. Pour autant, je crois qu'il est bon de saisir ces opportunités. Je ne dis pas que c'est une bonne opportunité celle qu'on vient de vivre, mais cela permet surtout de voir autre chose, de voir différemment.
J'accompagne beaucoup d'entreprises et de dirigeants qui disent en parlant des jeunes, “regarde il m'a trahi, c'est un jeune que j'ai formé pendant 3 ans, et il s'en va”. Oui, mais le gamin il voulait peut-être être comme vous, être dirigeant d'entreprise, faire le même métier. Il sait que pour faire ce métier, il est nécessaire d'apprendre vite et dans différentes entreprises, différents pays, sur différents continents. On voudrait les garder, mais eux veulent grandir, c'est compliqué. Justement, il faut être agile et accepter. Si vous acceptez que l'autre puisse prendre du plaisir et du bonheur, il vous donnera peut-être ce que vous attendez dans l'instant, ce sera éphémère.
Rebondir en remplissant la boîte de confiance
CT: Il y a des entrepreneurs qui avaient une boîte qui marchait bien, qui faisait des bons résultats, qui était en croissance. Ils étaient fiers d'eux. Le Covid arrive, demain ils vont se retrouver à -30, -40 %, licencier des gens, revenir peut-être au niveau où ils étaient 10 ans en arrière. C'est très dur à vivre. C'est un peu comme les sportifs qui gagnent et puis d'un coup il y a les défaites qui se succèdent. Émotionnellement, comment faut-il gérer cela, comment peut-on quand même passer cette période sans sombrer dans la frustration ?
DT: C'est d'autant plus difficile quand on s'est donné, quand on a travaillé pour obtenir quelque chose et que finalement on n’y est pour rien dans cette situation nouvelle qui nous oblige à repenser notre métier, à perdre des clients, peut-être même à perdre notre entreprise. Cela devient beaucoup plus complexe et chacun d'entre nous va vivre et essayer de trouver des solutions qui lui sont propres.
Je sais que ce n'est pas simple, mais il est bon d'aller rechercher le bon sens. Le bon sens pour vous, n'est pas le même que pour moi, et l'idée c'est d'aller chercher ce qui a fait que depuis ma naissance jusqu'à aujourd'hui, j'ai réussi à rebondir. Que s'est-il passé ? Aller rechercher toutes ces choses, tous ces moments de rebond, essayer de les mettre dans cette fameuse boîte de confiance, afin de pouvoir rebondir demain et après-demain. Il faut se rappeler tout ce qu'on a fait de bien, tout ce qui était profitable, tout ce qui était bénéfique, tout ce qui était positif, tous ces moments de réussite et de fierté que j'ai pu vivre tout le long de ma vie et de ma carrière, et essayer d'en faire un concentré. Je sais que c'est compliqué, mais il faut faire un concentré de toutes ces bonnes choses et se dire “OK c'est la vie, je n'y suis pour rien”. Je ne vais pas me mettre une balle dans le pied, parce que déjà sans balle dans le pied, je vais avoir du mal à y arriver. Je vais essayer de faire en sorte de pouvoir rebondir, mais avec tout ce qui m'a été transmis, tout ce que j'ai acquis depuis toujours et qui est en moi. Si c'est en moi, je suis capable de le retrouver et de rebondir. C'est une des possibilités et bien sûr, il y en a d'autres. Chacun va trouver ses repères et ses possibilités, ses ressources pour pouvoir affronter, confronter et se servir des crises passées. Se dire que vous n'êtes pas seul n'arrange personne, mais se dire que j'ai peut-être les armes en moi pour y arriver c'est certainement mieux.
CT: Merci beaucoup Denis pour toutes ces bonnes choses.
Pour aller plus loin
si vous voulez en savoir plus sur Denis Troch, un très bon podcast de Matthieu Stefani
sur l’intuition, une très belle analyse aussi de Frédéric Mazella dans cette interview par David Laroche
Devenez champions de votre propre monde: le livre récent de Denis Troch
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