Le bricolage fait partie de ces mots malchanceux qui ont un double sens: il décrit à la fois l’activité manuelle dans le domaine de la maison exercée à titre non professionnel, et tout travail de rafistolage fait à la va vite. Je suis un passionné du bricolage, mais je n’aime pas le mot, car je suis toujours gêné par cette connotation négative. Je préfère beaucoup l’expression anglaise neutre: D.I.Y (do it yourself).
Cette passion du bricolage est certainement un atavisme, puisque mon père et mon grand-père étaient artisans. J’ai déjà rénové intégralement 2 maisons et 2 appartements, et activement participé à la construction d’une 3ème maison. Je viens encore de passer mes vacances à faire de la maçonnerie.
De ces milliers d’heures de pratique, j’ai tiré quelques leçons applicables à l’entrepreneuriat et au management.
Quelques nouvelles avant de commencer
Après la trêve estivale qui je l’espère a été bénéfique pour vous, nous voilà repartis ensemble sur un rythme hebdomadaire.
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Bravo à Olivier qui est devenu le 500ème abonné début août et qui a gagné un livre sur l’innovation.
Je débute en septembre l’accompagnement d’un entrepreneur qui m’a sollicité suite à la lecture de la Newsletter. C’est le deuxième, puisque je coache aussi une entrepreneure, abonnée de la première heure. D’autres m’ont aussi contacté mais rien n’est encore finalisé. Si vous avez des besoins ou des questions, n’hésitez pas à m’écrire.
J’ai calé pour les semaines qui viennent des entretiens avec des personnes remarquables, qui ont un message très fort à partager. Je ne vous en dis pas plus pour le moment.
Je lance la version anglaise de la Newsletter à partir du 10 septembre. Elle paraîtra deux fois par mois le jeudi et reprendra les meilleurs articles d’Un pas dans l’inconnu. Vous avez des amis anglophones que cela intéresserait, vous pourrez les inviter à s’inscrire dès la semaine prochaine.
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Inclure les aléas dans le planning
Planifier un chantier important, estimer à l’avance combien il va falloir de temps pour le réaliser est essentiel. Même avec de l’expérience, je me trompe très régulièrement dans ce domaine, et assez souvent d’un facteur 2 voire 3.
Ce que j’ai compris avec le bricolage, c’est pourquoi il est difficile d’estimer la bonne durée. Face à un chantier donné, le bricoleur expérimenté, va mentalement découper la tâche à accomplir en actions élémentaires dont il connait la durée, ce qui lui permet d’apprécier la durée totale. On connait le temps qu’il faut pour visser une vis, découper une planche, souder un tuyau, poser une plaque de plâtre, et donc par déduction le temps qu’il faut pour enchainer ces actions élémentaires. Mais alors où est l’erreur ?
Dans le bricolage, l’erreur d’estimation vient des imprévus: une mèche qui casse dans le béton, une rupture d’approvisionnement au magasin, une erreur de coupe qui oblige à recommencer, un panneau qui éclate en le vissant, un câble qui coince dans la gaine, … Que ce soit du fait d’un élément extérieur, ou d’une erreur du bricoleur, il y aura toujours un incident qui va faire exploser le planning, parfois dans des proportions incroyables: l’action de 5 minutes peut prendre 4 heures ou l’erreur anodine peut coûter deux jours. Le problème c’est qu’il est impossible de prévoir où et quand vont se produire les incidents, et combien il y en aura.
Une autre cause d’erreur est l’optimisme forcené du bricoleur qui se voit plus fort, plus courageux, et plus énergique qu’il n’est en réalité !
Avec les jeunes entrepreneurs que nous accompagnons, je retrouve exactement ce phénomène. Les plannings sont faits sans prévoir les aléas et les entrepreneurs se voient plus efficaces qu’ils ne sont. Résultat, ils sont quasi systématiquement en retard. Suivant le vieil adage “le temps c’est de l’argent”, le retard se traduit très souvent par des problèmes de trésorerie. Et cela peut être très grave !
Une règle assez simple (et prudente) est de prendre pour planning raisonnable, deux fois le temps estimé en première instance, si vous êtes relativement expérimenté, et 3 fois si vous êtes encore à vos débuts, tout en faisant tout pour respecter l’estimation initiale.
Choisir ses outils
Quand j’étais petit, j’entendais souvent dire: “un mauvais ouvrier se plaint toujours de ses outils”. Certes, essayer de scier une planche avec une hache a peu de chance de donner de bons résultats. Cependant, une fois atteint le niveau minimum qui consiste à savoir utiliser un outil donné, la qualité, la spécificité et la sophistication des outils font ensuite une grande partie de la différence.
Il y a quelques années, il est apparu un outil multifonction (c’est son nom) assez extraordinaire pour effectuer des opérations quasi impossibles avec des outils classiques. Posséder ou pas un tel outil peut faire la différence dans de nombreuses situations difficiles. Le travail impossible devient faisable, le travail difficile devient facile et rapide.
De la même façon, dans l’entreprise, avons-nous toujours le bon outil, le bon logiciel, la bonne méthode, le bon savoir-faire, le contrat adapté ?
Avec l’emprise de plus en plus importante du numérique dans tous les secteurs de l’entreprise, la question d’avoir le bon outil numérique se pose avec toujours plus d’acuité. Tous les jours, je suis bluffé par les nouveaux logiciels ou les nouvelles applications qui apparaissent et qui permettent d’optimiser, d’automatiser, d’accélérer ou tout simplement de réaliser des opérations impossibles jusqu’alors. Voir des exemples d’outils numériques dans la rubrique “Pour aller plus loin”.
Deux règles simples:
en toutes circonstances importantes, se demander si on utilise le bon outil ?
faire une veille permanente sur les nouveaux outils pour connaître ce qui existe et pouvoir ensuite s’en servir au moment opportun.
Visualiser avant d’agir
Il est des configurations de chantier qui rendent la tâche très délicate. Que ce soit l’exiguïté de la pièce, la localisation inaccessible, ou encore le risque élevé d’endommager un élément environnant, maintes situations demandent de réfléchir avant d’agir.
Réfléchir ne suffit pas. S’entraîner, répéter le geste pour être sûr de le réussir est beaucoup plus efficace. La plupart du temps, il n’y a qu’une opération à faire et donc aucun moyen de s’entrainer.
La solution est la visualisation mentale. Les sportifs blessés pratiquent des exercices physiques mentaux pour entrainer leurs muscles immobilisés. Aussi surprenant que cela puisse paraître, cela fonctionne. Les muscles ainsi virtuellement sollicités s’atrophient moins. La répétition mentale d’un geste compliqué vaut entrainement.
Lorsque je sais que j’ai un chantier particulièrement difficile à faire, je vais le répéter mentalement pendant les semaines qui précèdent. Cette pratique consiste à visualiser de façon aussi précise que possible la situation, puis les actions à mener et enfin leurs résultats. Elle permet de décortiquer le travail en une série de gestes élémentaires, de vérifier que ceux-ci sont possibles et de pratiquer différentes solutions pour voir laquelle est la plus efficace. Grâce à cette méthode, j’ai souvent trouvé des solutions assez différentes de ce que j’aurais fait en première instance.
Après avoir pratiqué la visualisation, vient le jour d’effectuer le travail. La sensation de déjà-vu est alors surprenante. Comme s’il s’agissait d’une opération déjà faite, les bons gestes viennent naturellement, la confiance est importante et les résultats sont généralement au rendez-vous.
Dans Un pas dans l’inconnu #29, j’ai donné un exemple concret d’application de la technique de visualisation mentale à l’environnement professionnel.
Une règle élémentaire consiste à ne jamais effectuer un travail difficile et/ou délicat sans s’être entrainé auparavant grâce à la visualisation mentale.
Identifier les effets de bord
Peindre autour des portes, coller les bords de la moquette, poncer le parquet dans les angles, enduire derrière les tuyaux, terminer proprement la coupe d’un panneau de bois sont autant de tâches difficiles, en tous cas plus difficiles que les mêmes actions réalisées au milieu. C’est ce que j’appelle l’”effet de bord”, en référence au terme utilisé en physique ou en informatique, pour désigner les comportements instables pour des conditions particulières.
Les effets de bord sont à l’origine des défauts (marques du pinceau, éclats du revêtement, irrégularités des coupes, désalignement, …) et concentrent une bonne partie du temps passé. Paradoxalement, le bricoleur va passer un temps important sur les bords, et c’est pourtant là que le travail sera le moins bien fait.
Dans le travail professionnel non manuel, il existe aussi de nombreux effets de bords, mais ceux-ci sont souvent moins évidents à remarquer et peuvent donc conduire à des situations ayant des conséquences non négligeables.
Quelques exemples d’effets de bord assez communs: la gestion du client atypique qui sort des process habituels, la logistique des colis au format non standard, le fonctionnement en période de vacances, le redémarrage des machines après une longue période d’arrêt, le démarrage ou la fin d’un gros projet, …
Dans chaque projet, dans chaque secteur de l’entreprise, la conscience des effets de bord doit être développée, afin que chaque salarié soit en capacité de les gérer au mieux. Cela passe par l’adaptation des procédures, la formation, mais aussi par des décisions radicales comme par exemple celle de ne plus servir les clients trop atypiques.
La loi de Pareto qui dit que 80% des résultats sont obtenus avec 20% du travail est une matérialisation concrète de l’impact des effets de bord. Bien utilisée, elle peut avoir un impact drastique sur la productivité.
Bannir les petites flemmes
Le bricolage à haute dose peut être assez fatiguant. Pour ma part, j’avoue qu’il m’arrive régulièrement par paresse ou par fatigue, de chercher à prendre des raccourcis. Utiliser un outil inapproprié au lieu d’aller chercher le bon outil deux étages plus bas, ne pas prendre le temps de bien fixer l’élément à scier, ne pas passer deux heures à protéger l’environnement du chantier avant de commencer, mesurer approximativement quand la mesure précise est compliquée, sont autant de situations apparemment anodines dictées au final par l’illusion qu’on pourra, pour une fois, échapper à la fatalité en prenant un raccourci.
Combien de fois ai-je regretté pendant des heures d’avoir pris un raccourci au vu des conséquences désastreuses engendrées. Je me souviens d’une chute assez douloureuse pour avoir voulu utiliser un escabeau dans un escalier au lieu de prendre le temps de construire un échafaudage adapté. Et je ne parle pas de la dernière en date de ce week-end: un mauvais report de mesure, irrattrapable ensuite dans la construction d’un escalier en pierre.
Cette situation n’est pas propre au bricolage, et peut bien sûr se produire au bureau. “Oublier” de donner des informations pour s’épargner une réunion ou un message, commencer le travail avant de recevoir la commande qui finalement ne viendra jamais, faire une opération fastidieuse à la main plutôt que d’investir dans l’apprentissage d’un outil informatique, faire l’impasse sur un compte-rendu important, ne pas relancer un client, … Il y a tant de situations où la paresse, la fatigue ou l’illusion qu’on pourra gagner du temps, nous poussent à prendre des raccourcis qui se payent cash ensuite.
Une façon efficace de s’encourager à faire l’effort nécessaire, lorsque notre paresse ou notre fatigue nous pousse au raccourci: se souvenir de la fois précédente où une telle situation nous a couté très cher. Cela donne généralement la motivation pour faire ce qu’il faut !
Se souvenir que “le mieux est l’ennemi du bien”
A l’opposé des petites flemmes, mais aux conséquences souvent identiques, figure l’irrésistible besoin de chercher à corriger un défaut quasi invisible: chercher à enlever une micro-tache avec un produit inapproprié et se retrouver avec une macro-tache, vouloir corriger un léger défaut de planéité avec un rabot et se retrouver avec un énorme trou lié à un faux mouvement, ne pas attendre que la colle soit sèche pour poncer et tout entacher, …
Alors que tout est terminé, la retouche va tout gâcher et le remède sera pire que le mal. S’en suit alors la nécessité de recommencer une grande partie du travail, ou parfois des conséquences encore plus graves.
Tout le monde n’est heureusement pas atteint de ce mal appelé “perfectionnisme”, mais ceux qui le sont doivent apprendre à se contrôler. Il en est de même en milieu professionnel.
Vouloir bien faire n’est en soi pas un problème, mais le perfectionniste doit évaluer avant d’agir la nécessité réelle de l’action corrective (le défaut est-il grave ?), ses conséquences probables (quelle est le risque de tout gâcher ?), et son coût (temps passé additionnel), au regard des exigences imposées par les normes qualité de l’entreprise, l’attente du client et la rentabilité de l’opération.
Le bricolage mais pas seulement
Le bricolage me rappelle des leçons essentielles que je ne dois pas oublier lorsque je suis au travail dans des situations où il est facile de se faire piéger.
J’ai pris le bricolage en exemple, car c’est une de mes passions, mais en fait quelle que soit votre passion, elle peut-être une formidable source de leçons pour votre travail.
Le sport, la musique, les arts plastiques, le jardinage, la mécanique auto offrent tous des occasions d’apprendre des leçons simples et concrètes, dont il faut ensuite se souvenir dans son environnement de travail qui peut parfois être un peu plus éloigné du bon sens.
Les leçons apprises au cours de la pratique de nos passions sont marquantes car elles sont généralement douloureuses. Lorsqu’on est motivé et engagé, les leçons sont plus fortes et restent plus facilement gravées dans notre tête.
Apprendre de ses passions est un formidable moyen de faire un pont utile entre sa vie personnelle et sa vie professionnelle ! On a bien qu’une vie !
Pour aller plus loin
pour les amoureux du bricolage, une très belle vidéo d’un Youtubeur chinois qui utilise les outils et méthodes traditionnels pour réaliser de beaux objets.
64 outils numériques indispensables pour lancer votre startup : un livre blanc édité par Laval Mayenne Technopole dans le cadre du programme Idenergie
Efficacité du dirigeant : qu'est ce que la loi de Pareto: un exemple parmi les nombreux articles détaillant l’utilisation de la loi de Pareto pour améliorer son efficacité.