Le premier jour du confinement, j’ai institué un rituel, appelé “Café du Matin”. Pour créer du lien avec mon équipe et démarrer la journée sur une note détendue, je partageais une pensée, une vidéo, une énigme, d’abord par email, puis très vite sur Slack.
Dans le Café du Matin #1, j’écrivais ceci: “Un conseil malin que j’ai vu sur twitter pour les télétravailleurs ! Pesez-vous tous les matins !”. Comme j’aime être aligné (voir Un pas dans l’inconnu #9), je l’ai fait. Résultat, six mois plus tard, j’ai perdu 7kg (série en cours).
C’est, je crois, un exemple de l’adage souvent entendu “Tout ce qui est mesuré et observé, s’améliore.” Comment est-ce possible ?
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Les chiffres sont objectifs
Lorsque je rencontre des entrepreneurs encore au début de leur aventure, je pose des questions précises qui appellent des réponses chiffrées, sur les marges, le prévisionnel, la trésorerie, le chiffre d’affaires. J’ai parfois la surprise de découvrir des entrepreneurs qui ne maîtrisent pas ces chiffres et qui répondent par des approximations ou des périphrases. Je me dis alors qu’ils sont mal partis.
Même si les chiffres ne sont pas vos amis, il est essentiel de maîtriser les chiffres clés de votre activité, les fameux KPI’s (Key Performance Indicators).
Contrairement aux impressions et aux émotions, les chiffres sont des mesures objectives d’un fait. Ils aident donc à évaluer le résultat des actions et des efforts.
Mais peuvent-ils aider aussi à améliorer les performances ? C’est ce que semble insinuer le dicton attribué à Bob Parsons, le fondateur de Godaddy, “tout ce qui est mesuré et observé, s’améliore.” Mais qu’est-ce que cela veut dire ?
Les chiffres permettent la prise de conscience
Dans l’exemple personnel donné en introduction, pourquoi ai-je pu perdre du poids ? En quoi le fait de se peser tous les matins et de noter le résultat dans un fichier Excel fait-il maigrir?
Bien sûr, il y a les éléments objectifs liés à la situation: pendant le confinement, je ne suis pas allé au restaurant et je n’ai plus mangé de sandwichs. J’ai mangé tous les jours la cuisine familiale plus équilibrée.
Le fait de mesurer et de noter mon poids m’a permis de prendre conscience des conséquences bénéfiques que commençait à me procurer la situation.
Les chiffres positifs enclenchent la boucle vertueuse
Encouragé par ces premiers résultats positifs (qui ne me devaient rien), j’ai voulu moi aussi contribuer pour accélérer le phénomène.
J’ai donc commencé à modifier légèrement mes habitudes, en prenant des mesures simples: arrêter de grignoter, manger une pomme tous les matins, prendre des portions plus petites, boire plus.
Le fait de mesurer et de visualiser des résultats positifs est un facteur de motivation. Pour ceux qui ont un peu l’esprit de compétition, cela donne envie de faire mieux et enclenche donc un mécanisme vertueux.
Les chiffres se partagent
Il y a deux ans, une de mes équipes a décidé de créer dans son bureau un tableau des indicateurs. Sur le grand vinyle blanc qui sert de tableau, les 3 ou 4 indicateurs clés de l’activité principale sont inscrits en indiquant d’abord l’objectif, et ensuite en mettant régulièrement à jour la valeur courante.
A chaque début de semestre ou au démarrage de chaque grand projet, le tableau est effacé et une nouvelle salve d’indicateurs est proposée.
Dès que j’entre dans leur bureau, je peux en un clin d’oeil m’informer de la situation. Chaque collègue ayant ainsi sous les yeux les chiffres peut par exemple, prendre conscience du retard, et contribuer à le rattraper. Auparavant, seule la responsable de projet avait connaissance des chiffres et devait donc alerter en cas de problème. Si au contraire les résultats sont bons, chacun est encouragé et gratifié du travail accompli.
La connaissance partagée implique chaque membre de l’équipe dans la réalisation de l’objectif et agit bien plus efficacement qu’une pression exercée sur chacun par le manager.
Les chiffres révèlent les erreurs
L’entrepreneur Olivier Picard, partage dans une video à propos des tableaux de bord, un exemple intéressant. Alors qu’il lançait une nouvelle activité sur internet, il avait défini quelques indicateurs, mais l’activité ne décollait pas.
Croyant que ses vidéos de présentation du produit n’étaient pas convaincantes, il passe une semaine à les refaire, mais cela n’améliore pas les ventes. Après avoir failli abandonner, il décide de revoir son tableau de bord et de contrôler chaque étape du tunnel de vente.
Il découvre alors une énorme déperdition entre les gens qui ont laissé leur email et ceux qui lisent les premiers conseils donnés gratuitement. Il comprend que ses emails tombent dans les spams de la plupart des destinataires. Il passe une heure à résoudre le problème et multiplie ses résultats par 15.
La mesure est souvent bien plus efficace que l’intuition de l’entrepreneur, même si celui-ci est expérimenté. Elle permet de corriger les erreurs et donc d’améliorer le résultat.
Les chiffres s’apprivoisent dès le début
On pourrait facilement croire que les indicateurs formalisés ne sont nécessaires que lorsqu’il est impossible de mémoriser tout ce qui se passe et de suivre en temps réel l’évolution des évènements. Ils sont bien évidemment dans ce cas irremplaçables.
Le créateur d’entreprises encore au début de son projet peut penser qu’il n’est pas nécessaire d’avoir un tableau de bord, alors qu’il n’a que quelques clients et qu’il réalise au mieux une vente par mois. Il croit avoir tout dans la tête.
Cette attitude très fréquemment rencontrée, est une grave erreur. En effet, il est bien plus facile de créer un tableau de bord puis de le remplir, dès le début, putôt que quand tout s’accélère ou bien quand tout part à vau-l’eau. Les bonnes habitudes doivent être prises tôt, avant l’arrivée des premiers salariés. Ils adopteront ainsi beaucoup plus facilement cette culture des indicateurs.
Si les indicateurs macroscopiques tels que le chiffre d’affaires, ou le nombre de vente sont trop peu significatifs au début, il faut en trouver d’autres qui correspondent mieux à la situation: le nombre de RV commerciaux, le nombre de devis émis, le traffic sur la landing page, …
Comme compter s’apprend à la maternelle, suivre les indicateurs doit démarrer dès la création de l’entreprise, ou la prise de fonction pour les managers.
Les chiffres ne mesurent pas tout
Les chiffres sont utiles pour améliorer les performances, mais ils ne disent pas tout. Simon Sinek en donne une magnifique illustration. Il explique que la dynamique, la manière (il utilise le mot anglais “momentum”) sont plus importantes que le résultat.
Le commercial qui atteint son objectif de façon erratique sans savoir exactement comment il a fait, est moins intéressant pour une entreprise que celui qui n’atteint pas tout à fait l’objectif, mais déroule un processus de vente solide et prédictible.
L’équipier moyen en qui on peut faire une totale confiance est plus utile pour une équipe que celui qui est très performant, mais absolument pas fiable, et ce sont les Navy Seals, les forces spéciales de la marine américaine, qui le disent. Elles sont pourtant très attachées à l’extrême performance de leurs membres.
Une fois les indicateurs mis en place, il convient de s’assurer que ce ne sont pas les seuls critères d’évaluation, car la manière est souvent aussi intéressante, voire plus intéressante que le résultat. Une approche purement quantitative peut rapidement détruire une équipe.
Trop de chiffres tue les chiffres
A l’heure du big data, il est de plus en plus facile de disposer d’énormément d’indicateurs. Le dirigeant se retrouve ainsi comme devant un buffet à volonté, alors qu’il a besoin de mets triés sur le volet.
La tentation est grande de vouloir tout suivre pour ne rien rater. C’est une mauvaise façon de voir les choses. Le dirigeant doit se focaliser sur les indicateurs clés, actionnables, et alignés avec ses objectifs.
En voulant améliorer trop d’indicateurs en même temps, on va déclencher de multiples actions qui vont impacter les indicateurs, parfois de façon contradictoire et au final on ne comprendra pas quelle action agit sur quel indicateur. Notre cerveau ne sait pas gérer les systèmes multiparamétriques.
La facilité de suivi de multitudes d’indicateurs que procurent par exemple les logiciels de Business Intelligence, ne doit pas faire perdre de vue les quelques paramètres clés dont dépendent le succès de l’entreprise, et sur lesquels il faut concentrer ses actions.
Mais alors c’est quoi les bons chiffres à suivre ?
Bien sûr qu’il n’existe pas une liste universelle de KPI’s à suivre. Les bons indicateurs dépendent de votre secteur d’activités, de l’âge de votre business, de votre fonction dans l’entreprise, de vos objectifs, de vos valeurs et même de votre personnaliré.
Il revient donc à chacun de choisir les indicateurs qu’il cherche à améliorer, en fonctions de ses objectifs.
Les indicateurs peuvent varier au cours du temps. Après avoir travaillé dur pour améliorer un indicateur clé, il sera devenu tellement bon et stable qu’il deviendra inutile de continuer à le suivre aussi intensément. Il rentrera alors dans la catégorie des indicateurs secondaires à seulement surveiller de temps en temps, pour vérifier qu’il n’y a pas de dérive.
Dans la section “Pour aller plus loin”, vous trouverez quelques liens de bonnes ressources expliquant les bons indicateurs correspondant à certaines situations. Internet regorge de ce type de conseils et il y en a surement qui correspondent à votre métier.
Avec les chiffres, pilotez l’inconnu
Vous vous êtes lancé dans l’inconnu d’une création d’entreprise, d’un nouveau projet innovant, d’un nouveau poste à responsabilité. Cet inconnu n’est pas balisé et il peut être difficile pour vous de vous repérer. Pour éviter le pilotage à vue, ou pire le pilotage dans le brouillard, il est bon d’écouter ce que nous dit Peter Drucker, le célèbre professeur américain de management, auteur de nombreux ouvrages: “Vous ne pouvez pas piloter ce que vous ne pouvez pas mesurer.“
En mettant en place des indicateurs mesurables, simples à interprêter et actionnables, vous allez considérablement réduire le flou de l’aventure et retrouver progressivement la sensation d’être à la barre et de piloter.
Pour aller plus loin
Quels sont les KPI à suivre pour votre startup ? : une masterclass de Jean de la Rochebrochard, sur les KPI’s pour les startups web.
Les métriques en mode SaaS partie 1 et partie 2: une masterclass d’Oussama Ammar sur les KPI’s pour les entreprises en mode SaaS.
Merci Christian pour cet excellent article et pour le tuyau : je commence aujourd'hui à noter mon poids tous les matins. Je te dirai si ça marche….
Amitiés.
Nathalie
très très bon ce #32. Merci Christian. je vais le partager au travail .....