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Le premier numéro de l’année est souvent un exercice imposé.
Écrire des vœux (UPI#2), parler d’espérance (UPI#47), inciter à l’action (UPI#77), ouvrir le champ des possibles (UPI#101), prendre des bonnes résolutions (UPI#123), autant de thèmes déjà abordés les années passées que je vous invite à relire.
Que sera 2025 ? Nul ne sait le dire.
Le futur est par essence incertain.
2025 est-elle plus incertaine que d’autres années ?
Je n’aurai pas la prétention de vous dire ce que sera 2025, mais je vous propose une réflexion sur la gestion de l’incertitude qui est au fond la thématique principale de cette Newsletter qui ne s’appelle pas “Un pas dans l’inconnu” pour rien !
Avant de commencer
Cette Newsletter commencée à l’aube de l’année 2020, quelques semaines avant l’incroyable expérience de la pandémie, attaque donc sa sixième année.
J’ai démarré sur les chapeaux de roues, avec l’insouciance du débutant, à un rythme d’un numéro par semaine. J’ai tenu cette cadence infernale pendant 60 numéros, avant de passer à un numéro tous les 15 jours.
Sans jamais manquer une échéance, j’ai toujours réussi à envoyer à l’heure prévue, le mardi matin à 9h.
Combien de temps tiendrai-je encore ?
J’ai parfois l’impression d’avoir tout abordé, de me répéter.
Je voudrais traiter des sujets plus en profondeur, plus étayés, mieux documentés. J’adorerais cela tant j’apprendrais en le faisant. Malheureusement, l’investissement nécessaire est important et je ne suis pas (encore) un créateur de contenu à temps plein ! Je reste donc avec cette frustration de parfois survoler certains sujets, de ne pas toujours pouvoir les illustrer avec des exemples précis. Vous me pardonnerez.
N’hésitez pas à réagir, à m’écrire, à poser des questions, à exprimer vos désaccords. J’apprécie toujours vos messages qui sont autant d’encouragements.
N’hésitez pas non plus à partager avec vos amis, à reposter sur les réseaux sociaux pour faire découvrir à d’autres ce contenu. Je vous en remercie.
Je vous souhaite une bonne lecture et bien sûr une excellente année 2025.
Mais qu’est-ce que l’incertitude ?
L’incertitude est partout, consubstantielle de notre existence.
La physique quantique depuis Heisenberg nous indique que même la matière obéit à des principes d’incertitude !
Le futur est le lieu par excellence de l’expression de l’incertitude. Tout ce qui est futur est par définition incertain. Nul ne peut savoir ce qu’il adviendra dans la minute, l’heure ou la semaine à venir, et cela qu’elle que soit la situation passée, qu’elle ait été stable ou non.
Nous essayons de nous auto-persuader que ce que nous avons connu dans le passé et que nous connaissons dans le présent, sera encore vrai dans le futur.
Tous les détails importants de notre vie (notre corps, notre lieu de vie, notre travail, notre entourage, l’atmosphère générale dans laquelle nous évoluons) sont présupposés des invariables qui nous permettent de consacrer notre gestion de l’incertitude sur des activités précises comme un match sportif, un projet au travail, ou l’aboutissement d’une nouvelle relation.
Penser cela nous aide à vivre dans un certain confort. Se préoccuper à chaque instant de tous les incidents qui pourraient advenir sur notre environnement familier serait une charge mentale trop lourde. Pourtant ces éléments de notre environnement sont eux aussi incertains.
C’est cette incertitude matérialisée par l’écoulement du temps qui nous intéresse dans cet article.
L’autre grand domaine d’incertitude que nous traiterons pas est l’incertitude intime qui régit nos croyances, nos sentiments, nos points de vues, nos idées et détermine une bonne partie de nos comportements et de nos relations.
Pourquoi certains moments apparaissent plus incertains que d’autres ?
Même si tout est incertain, si notre environnement le plus stable peut évoluer d’un instant à l’autre, nous ressentons émotionnellement qu’il est des moments qui apparaissent plus incertains, en lien avec des circonstances particulières de nos vies (les examens ou la maladie par exemple) ou en lien avec des évènements extérieurs comme une tempête ou un mouvement social d’ampleur.
Notre ressenti d’incertitude est une sorte de calculette interne de la probabilité qu’il se passe quelque chose.
Quand nous nous sentons en paix, par exemple au coin du feu chez nous avec nos proches, notre calculette interne d’incertitude affiche une probabilité très faible qu’il se passe quelque chose. Il n’en est pourtant rien, car dans la seconde le téléphone peut sonner apportant une mauvaise nouvelle.
Quand au contraire nous ressentons un fort sentiment d’incertitude, c’est que notre calculette affiche une probabilité élevée d’un évènement imprévu. L’été dernier, on nous avait conditionné pour craindre qu’il se passe quelque chose qui perturbe les Jeux Olympiques. Notre ressenti d’incertitude était élevé et pourtant il ne s’est rien passé.
Notre calculette d’incertitude est alimentée par les médias, l’entourage, et nos propres peurs. Elle ne représente en aucun cas un instrument fiable. La calculette de chacun affiche une indication différente qui dépend de notre inclinaison à projeter des évènements tragiques.
Lorsqu’une majorité de gens affichent une haute valeur d’incertitude, cela crée un sentiment partagé de période à risque.
2025 fait sans doute partie des années qui débutent sous un signe largement partagé d’incertitude. Que ce soit la situation politique française, la situation économique ou la situation géopolitique avec les guerres en cours et le démarrage de la deuxième présidence Trump, il est difficile d’identifier des facteurs de stabilité collectivement admis. Chacun à titre individuel peut bien sûr ressentir une certaine sérénité liée à une situation personnelle stabilisée, mais il sera malgré tout pris dans l’ambiance d’incertitude générale.
L’incertitude est nécessaire
Imaginons un monde où tout serait certain, où rien n’arriverait qui n’ait été prévu. Tentant pour les anxieux mais en réalité cauchemar absolu.
Lorsque le futur est prévisible, la vie est une prison et son piment disparaît, l’ennui guette.
Nous nous plaignons de l’incertitude mais pourtant c’est l’essence même de la vie.
Le capitalisme prône la saine concurrence pour prospérer et pourtant, individuellement les entreprises n’ont de cesse de chercher la situation de monopole. Un paradoxe du même type s’applique aussi à l’incertitude.
L’obsession d’une entreprise bien gérée est de limiter l’incertitude en mettant en place des process résilients dont les règles limitent les initiatives individuelles pour éviter d’introduire des sources d’incertitude. Les entreprises réclament en permanence de la visibilité sur les lois, les normes, les règles fiscales et détestent les changements non prévus.
Et pourtant, les grandes réussites des entreprises se créent sur des ruptures de trajectoire appelées innovations, qui sont par nature des projets hautement incertains. La réussite entrepreneuriale nait de l’incertitude.
Comme dans la vie, l’incertitude est au final une bonne chose pour les entreprises.
Que l’entreprise réagisse à l’incertitude externe ou la provoque en tentant de disrupter une situation ou en faisant un mouvement stratégique audacieux, l’incertitude met les équipes en tension et fait appel au meilleur de leurs compétences.
Lorsque l’entreprise réagit bien, les conséquences sont positives à long terme.
Pendant la crise du COVID l’incertitude était à son paroxysme. On a vu des entreprises se réinventer, changer de modèle économique, inventer de nouveaux produits hors de leur secteur traditionnel d’intervention, adopter en vitesse accélérée des outils digitaux et de nouvelles façons de travailler.
L’incertitude est donc bien une opportunité à saisir.
Je vous propose ci-dessous cinq principes pour y parvenir.
Rester droit dans ses valeurs
L’incertitude fait douter. Elle peut donc subrepticement faire vaciller nos valeurs.
Pour maximiser nos chances de réussir dans un environnement incertain et risqué, nous pouvons avoir l’illusion qu’il faut changer notre façon d’agir, assouplir nos règles dictées par nos valeurs, naviguer à vue et choisir dans l’instant le comportement à adopter.
Il n’y a pas pire illusion.
Dans l’incertitude, nous avons besoin de repères. Comme le marin cherche le phare dans la nuit brumeuse, nous cherchons à quoi nous accrocher dans le brouillard de l’incertitude. Si celle-ci est forte, il reste peu de points fixes.
Les valeurs inculquées dans l’enfance ou choisies à l’âge adulte suite à des décisions assumées sont assurément un phare dans la nuit. Quoiqu’il arrive, savoir que l’on a une boussole pour décider est un des rares éléments rassurants au milieu de l’incertitude.
Ce qui est valable à l’échelle individuelle l’est aussi pour l’entreprise. Les valeurs lorsqu’elles sont vivantes, ancrées dans le réel et incarnées par l’équipe jouent en temps d’incertitude le rôle d’un liant qui permet à l’équipe de rester unie.
Comprendre ses forces
Une entreprise bien structurée agit chaque jour pour accomplir sa mission (UPI#16) en lien avec la vision (UPI#10). Si tout cela est clairement énoncé, chacun sait ce qu’il a à faire.
En temps d’incertitude cependant, la vision peut être remise en cause et la mission chamboulée. Il n’y a qu’à se souvenir du confinement pour comprendre à quel point l’incertitude qui en a résulté a transformé la mission de certaines entreprises : certaines se sont mises à produire des masques, d’autres ont travaillé à la conception de respirateurs, et les TGV se sont transformés en ambulances.
Se préparer à toute éventualité en temps d’incertitude, y compris celle de changer de mission est une responsabilité du chef d’entreprise.
Changer de mission, trouver une nouvelle mission alignée avec les compétences de l’équipe peut être un mouvement stratégique salvateur lorsque le marché principal de l’entreprise vacille.
Lister les compétences, les savoir-faire, les aptitudes individuelles des collaborateurs y compris parfois extra-professionnelles, et bien sûr les équipements et les moyens techniques et croiser cela avec les besoins de différents marchés peut révéler des opportunités insoupçonnées.
Rechercher les “quick win”
A l’heure de l’incertitude, il n’est plus temps d’élaborer de grands plans stratégiques, ou d’investir beaucoup d’énergie dans un business-plan détaillé.
Un business-plan pour avoir un minimum de sens demande des données consolidées s’appuyant sur des hypothèses validées sur le terrain. Ceci est habituellement difficile mais devient impossible en temps d’incertitude.
Ne pouvant s’appuyer sur aucun contexte fiable, pour formuler des hypothèses et en déduire des données, il convient d’adopter une méthode beaucoup plus pragmatique.
Plutôt que de modéliser, il faut agir et tester. Tester rapidement une nouvelle idée pour valider par le terrain sa pertinence. La situation pouvant changer d’un jour à l’autre, il ne faut pas perdre de temps et agir pour apprendre du terrain et en tirer des victoires rapides.
L’action pragmatique a en plus l’avantage de mobiliser les équipes, de concentrer les énergies permettant ainsi d’éviter de trop stresser en laissant les émotions prendre de le dessus.
Agir donne une direction, ce qui n’est pas le moindre des avantages en période d’incertitude. Comme le vélo se maintient en équilibre tant qu’il avance, agir vite maintient l’entreprise dans la bonne dynamique en période d’incertitude.
En profiter pour apprendre
Il est toujours bon d’apprendre. Toutes les périodes ne sont toutefois pas également propices.
Quand tout va bien, que l’horizon est dégagé, que le plan de charge est au maximum, il est difficile de consacrer du temps à l’apprentissage. La motivation n’est pas au rendez-vous, car tout semblant clair, le besoin d’apprendre autre chose n’est pas perceptible.
Il est en autrement en période d’incertitude. Ne sachant pas de quoi nous aurons besoin et par quel chemin nous devrons passer, il est sans doute doute prudent et pertinent d’apprendre.
En 2025, il est au moins une certitude, il convient d’apprendre à utiliser l’intelligence artificielle.
Les annonces de la fin 2024 avec les sorties de nouveaux modèles aux performances incroyables laissent augurer d’une année 2025 décoiffante sur le sujet de l’IA.
Occupés à préparer Noël, vous n’avez peut-être pas vu passer l’annonce du nouveau modèle d’OpenAI, appelé o3, qui a obtenu 85% au test ARC-AGI, là où le précédent record était de 55%. Le test ARC-AGI bien qu’imparfait essaye de mesurer l’intelligence d’une IA. Un score de 85% est celui d’un humain moyen. L’intelligence artificielle générale n’est plus très loin !
2025 sera aussi l’année de déploiement des agents spécialement entrainés pour des effectuer des tâches spécifiques et devenir de véritables assistants pour un grand nombre de tâches répétitives à réaliser en entreprise.
Les grands éditeurs de logiciels vont aussi continuer à déployer leur IA en les intégrant de plus en plus au sein même de leurs différents outils pour atteindre une fluidité importante et donc des gains de temps significatifs.
J’entends déjà certains soulever les nombreux problèmes que posent l’IA vis-à-vis de l’éthique, de la confidentialité des données, de la transition écologique, ou même de la démocratie. Je ne nie pas ces risques. Mais ce n’est pas en refusant de s’y plonger que les risques vont disparaître. Faire l’autruche ne sert à rien.
S’attaquer sérieusement au sujet en se formant, en testant des outils et réfléchissant à des cas d’usages concrets dans l’entreprise est un excellent moyen de profiter d’une période d’incertitude et préparer l’avenir.
S’ouvrir aux autres
L’incertitude manque énormément d’objectivité. Chacun la lit à sa façon.
Plutôt que se s’enferrer dans sa propre lecture de l’incertitude, imaginer seul des scénarios et des plans B et C, il est préférable de chercher la confrontation des points de vue.
Là où l’ajout de multiples points de vue lorsqu’il faut prendre une décision sur une situation claire peut retarder le processus et apporter plus de confusions que de clarté, multiplier les points de vue en situation d’incertitude, tel un puzzle, fait apparaître petit à petit une image plus nette. Les points de vue partagés se complètent plus qu’ils ne se mélangent.
Échanger entre pairs, au sein d’une équipe, entre partenaires, voire même entre concurrents est toujours enrichissant, mais est d’autant plus important quand personne ne sait exactement à quoi s’attendre pour le futur.
Clarifier la situation en partageant les compréhensions de chacun, n’est que la première étape.
Rechercher ensemble la meilleure décision à prendre pour avancer permet d’éviter les biais dangereux en période d’incertitude : le biais de croire que nous savons faire alors que la situation est inédite, le biais d’optimisme qui pousse à croire que le pire n’arrivera pas, le biais de confirmation qui nous pousse à lire les informations reçues dans le sens de ce que nous pensons, le biais d’illusion de contrôle qui nous fait croire que nous contrôlons la situation ou le biais d’ancrage qui nous pousse à ne rien changer.
L’échange, l’ouverture aux autres est un antidote précieux contre ces biais qui nous menacent plus encore en période d’incertitude, où nous cherchons à nous raccrocher à des attitudes qui nous sont familières, alors qu’il est plus sage de favoriser l’expression de celles et ceux qui combattent le status quo.
En 2025, serons-nous intelligents ?
Kant écrivait : “L’intelligence d’une personne se mesure à la quantité d’incertitudes qu’elle est capable de supporter”.
Pour sûr, 2025 nous réserve son lot d’incertitudes.
Saurons-nous nous montrer intelligents et supporter ces incertitudes ?
Le chemin que je vous propose devrait vous y aider. Revenez à vos valeurs et cultivez-les car elles sont précieuses, analysez bien vos forces et celles de votre équipe car ce sont elles qui vous sortiront d’une situation périlleuse, recherchez l’action et les victoires rapides plutôt que les plans sur la comète, apprenez de nouveaux savoir-faire (l’IA est sûrement un bon investissement) et restez connectés à votre entourage car ensemble l’incertitude diminue.
Et rappelez-vous, l’incertitude cache des opportunités !
Bonne année 2025 !
La minute d’informations
Je me permets de partager ici des informations ou activités sans liens obligatoires avec le thème de l’article, mais dans lesquelles je suis impliqué.
2025, avec l'innovation tout devient possible !
L’équipe du West Data Festival vous souhaite une année 2025 pleine de réussites, d’inspirations et d’innovations !
Et si votre première résolution concernait l'utilisation de l'IA et des données ?
Du 11 au 13 mars 2025, à Laval, venez découvrir les avancées sur l’intelligence artificielle et sur la data.
Pendant ces 3 jours, apprenez à exploiter les données, approfondissez vos connaissances en intelligence artificielle, rencontrez des experts et repartez avec des outils concrets pour innover et optimiser vos projets.
Au programme : des conférences, des ateliers ou encore des retours d’expériences, avec des sujets variés tel que : les IA génératives, la Cybersécurité, la Data Gouvernance, la Finance, l’Industrie, la Mobilité, la Santé, l’Économie Circulaire...
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Merci Christian pour ton travail difficile. Je me suis posé une question pk avoir titrer avec le verbe affronter ? accueillir, ou faire la différence avec, ou encore décider pleinement... aurait ouvert une autre perspective ...l'incertitude n'est pas notre ennemi, il est ce que le monde des matérialistes nomment et définit comme tel selon la raison seule et pire, selon leur volonté. C'est devenu un "impenser" moderne, quelle erreur, est-elle volontaire ? peut-être une future question à traiter pour réhabiliter ce qui est et agit, depuis toujours, en nous, autour de nous, partout, et donc sur ce qui nous arrive(ra). bonne année de fécondes incertitudes cher Christian.
Merci pour cet article extrêmement motivant et pratique. J'ai l'impression que l'ouverture aux autres peut rentrer en conflit avec les “quick win” , donc on doit jauger pour ne pas rester dans d'interminables discussions mais tout de même faire le parcours de l'échange constructif avec ses pairs